Mon premier vrai pseudonyme officiel date de 2006. Je devenais traducteur littéraire pour la maison d'éditions J'ai Lu. Un métier que j'ai exercé trois ans durant, et qui m'a passionné. Qui m'a questionné sur l'écriture, sur comment tricoter un roman. Aussi fleur bleue soit-il. Car j'ai traduit 11 romans dits sentimentaux, pour la collection "Aventure et passions". Tranche, couverture et quatrième de couverture rouge passion. Du sentimental historique sis au 12e siècle, par exemple. Je me souviens d'une histoire dont l'héroïne qui maniait aussi bien le bâton que... le "bâton". Il s'agissait de retranscrire en français des scènes de combat. Ou, plus proche de nous, des romances se déroulant durant l'époque victorienne. Scènes de combat où le héros roulait des mécaniques, muscles saillants, pour impressionner et/ou délivrer l'héroïne des mains de brigands. Descriptions élaborées de domaines verdoyants, de nuages moutonnant, intermèdes de charme, épisodes érotiques.
J'ai pour ces derniers vécu des moments de grande solitude. Oui. Imaginez un gars tout ce qu'il y a de plus homo à qui l'on demande de traduire des scènes de sexe hétéro. Eh bien, c'est comme tout, c'est possible. Il suffit de se documenter et d'avoir autour de soi des amies pas avares en confidences sexuelles, en vocabulaire, en métaphores olé olé. J'ai encore ce gros cahier où je notais les expressions que je glanais au cours de mes lectures, de mes discussions, de mes découvertes. Dans le roman sentimental, on évite d'écrire "dire" à tous les coins de dialogues. On foisonne. On synonyme. On connaît une tripotée de verbes : des se sermonna-t-elle, s'enquit-il, riposta-t-elle, des tempêta, commenta, contesta, fulmina, grommela, objecta et des se gourmanda-t-elle, j'en ai usé et abusé.
Dans mon cahier, de a à z, je faisais collection de mots et d'expressions. De C pour ma liste de convenances, de F pour femmes (termes élogieux, péjoratifs ou familiers : un joli brin de fille, des péronnelles, une créature, une harpie, une merveille ou une gourgandine), de J pour jurons (fils de catin vérolée !), de R pour regard (regard circulaire, appuyé, furtif, fuyant, prompt, brouillé de larmes, injecté de sang, ou oblique, torve) ou pour finir, à Y pour yeux avec une expression que j'ai dû utiliser une ou deux fois : "seul l'éclat inquiétant qui luisait au fond de ses yeux trahissait la colère qui couvait en lui."
Je digresse, pauvresse. Ceci pour raconter mon premier véritable pseudonyme que j'ai assumé sur les étalages des buralistes de gare et des hypermarchés au rayon chicklit. Mon éditrice m'avait demandé de lui fournir assez vite un pseudonyme féminin. J'étais trop débutant pour signer dès le début avec mon véritable nom. Ça risquait d'effrayer la lectrice. Il fallait un nom de traductrice. Du roman écrit par des femmes pour des femmes (smiley roulant des yeux agacés). Et traduit par un homme se cachant sous un pseudonyme féminin. Le mien, Alice Bergerac.
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📌 Bonus : Mon petit cœur primesautier collectionne les mots.
énorme !!!!!!!!!! :DDD
RépondreSupprimerPutain, je te trouvais intéressant comme type, en fait, tu es passionnant !
MADAME Putain !
SupprimerPourquoi ne m'as-tu pas épousé ?
T'aimes pas les filles, t'as zoublié ?^^
SupprimerAh oui, c'est vrai. Oops j'avions oublié. Merci !
SupprimerJoli pseudo
RépondreSupprimerBelle histoire décalée pour un mercredi de première fois... ;-)
Merci Marie :)
Supprimeret j'ai bossé aux éditions J'ai lu de 1999 à 2001 !
Supprimerune ex-Périgourdine qui a connu ta soeurette :)
k.
Oh comme le monde est petit. Périgord-power ! (envoie-moi un e-mail --> desfraisesetdelatendresse@gmail.com)
SupprimerLaurent le Bel & rebelle, qui publie sur ses premières fois quand on ne s'y attend plus (ou pas), tu ne nous dévoiles pas pourquoi tu as retenu ce pseudo spécifiquement. C'était un choix délibéré ou le pur hasard dû au lancer de fléchettes sur le calendrier ?
RépondreSupprimerJ'ai un peu réfléchi, oui. Bergerac étant ma ville de naissance, j'ai opté pour ce patronyme fleurant bon le sud-ouest. Alice pour Alice, ma nièce, et celle de Lewis Carroll, le mythe de la traversée du miroir. Et sur une inspiration tout aussi prosaïque, j'ai songé aux noms de filles de vertu dont le pseudonyme correspondait au prénom d'une aïeule et à la rue de leur naissance, je crois.
SupprimerAlors d'abord, bonjour :)
RépondreSupprimerJe ne sais ce qui me fascine dans ces identités cachées. Ou plutôt, si, je le découvre en ce moment même, à travers un travail d'introspection un peu douloureux et perturbant, mais nécessaire : j'ai oublié une partie de moi en route. Les identités cachées permettent de laisser s'exprimer nos diverses personnalités, à travers elles. Et pour avoir, moi-même, parfois revêtu un masque qui me permettait de n'être pas préjugée (j'ai par exemple, été congolaise sur un forum congolais), les enseignements qu'on en tire sont édifiants (et parfois un peu déprimants, aussi).
Les blogs permettent cela aussi, je crois.
Mon commentaire est un peu brouillon ...
J'ai lu ton passionnant billet; quel homme ! :)
Re-bienvenue par ici !
SupprimerSans ton pseudo, je n'aurais pas mis de mots, de blog, sur ton visage lors de ce KDB sympathique où je t'ai croisée ^^
Tout est possible derrière un pseudo, tant le mensonge que la vérité, la sincérité.
Coucou !
RépondreSupprimerFinalement, tu as fait comme Georges Sand. Super ton billet (comme d'hab.) C'est une récréation de te lire. J'aime bien ton cahier de A à Z. Bisous
Coucou Véro. C'était un vieux billet que j'ai rhabillé pour l'hiver 2018 :-) Il faudrait que je réédite des bouts de mon cahier de A à Z, y a quelques perles sympathiques. Bisous du Sud.
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