Pages

Quand la vie est trop courte pour râler ou s'acheter des fleurs demain, j'invite le lecteur à s'émerveiller des petites choses. Dans les sillons creusés par l'inattendu ou le hasard, je sème les graines d'un regard humain, parfois mordant, et compose régulièrement un bouquet de rencontres ou d'échanges piquants, insolites, simples.

dimanche

Kiki et les Tic Tac


49 secondes de campagne

C'est un instant de campagne que je partage aujourd'hui avec vous (vidéo ci-dessus). Un grillon que ma sœur Sophie a enregistré chez ma mère. Quarante-neuf secondes qui me sortent du confinement et m'emportent en enfance. Quand, chaussé de mes bottes en plastique vert caca d'oie, j'arpentais les fossés humides en quête de faune et de flore, de têtards à mettre en bocal. Des amphibiens qui échappaient fatalement à mon observation — on ne m'appelait pas Laurent-la-lune pour rien —, qui devenaient crapauds hors du bocal, à la fraîche sous les plants de haricots verts et de pieds de tomates plantés par mon père.

Le parfum des feuilles de tomates ou le chant du grillon sont mes madeleines de Proust.

Au-delà de la ferme où l'on se ravitaillait en lait frais, une route interdite que je traversais malgré tout. De l'autre côté, mon Far West, un sous-bois, un tunnel qui serpentait sous le village, une maison abandonnée où je cherchais des trésors, et une petite route qui descendait à pic et longeait la Dordogne. Sur le bas-côté, je coupais à pleines mains de belles brassées d'herbe pour nourrir mon cochon d'Inde Kiki.

Je me revois offrir à ma voisine des Tic Tac au chocolat. J'avais fourré les crottes de Kiki dans une boîte de Tic Tac vide. Oh l'expression sur le visage de ma voisine ! Perplexe. Puis furieuse quand je lui ai avoué mon forfait.

C'est fou ce que le chant d'un grillon et le confinement peuvent produire comme souvenirs : un cochon d'Inde et des bonbecs aussi saugrenus qu'immangeables.


--
Note : L'émission du chant est réalisée en soulevant obliquement les deux élytres. L'élytre droit, qui porte sur sa face inférieure la râpe stridulante ou archet (alignement de dents lamellaires), recouvre toujours l'élytre gauche pour frotter son grattoir ou chanterelle. Deux zones membraneuses, la harpe et le miroir, amplifient les sons émis. Le grillon est ainsi droitier, à l'inverse de la sauterelle. Les grillons désensibilisent leur système auditif pour ne pas être assourdis par leur propre chant.
(Source : Wikipédia)

-----
Le journal de bord dans sa continuité → Journal tendre d'un confiné

22 commentaires:

  1. Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.

    RépondreSupprimer
  2. Merci pour tous ces souvenirs ramenés à la surface de La Gouyne, affluent de La Dordogne, où un œuf pourri à terminé sa chute après ricochet sur la tête une copine (ne serais pas la même qui a mangé les fameux Tic Tac ;) A l'époque nous ne demandions pas l'autorisation pour sortir et on ne nous demandait pas non plus la raison de nos sorties : nous partions à l'aventure avec les copains, voisins. Les têtards eux patientaient dans un bocal sur le bord de la fenêtre. Je n'oublie pas non le lait cherché à la ferme espérant découvrir sous la couveuse des poussins.
    Bises

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est vrai qu'on était livrés à nous-mêmes mais parce que les parents avaient confiance et parce que l'époque et les gens n'étaient pas aussi inquiets. Le fait qu'on était à la campagne y jouait pour beaucoup. Je me souviens de quand on allait payer le lait chez Mr et Mme Vacher, qu'on frappait timidement au carreau de la fenêtre. Les rues de Prigonrieux étaient à nous, c'était chouette. Bises itou.

      Supprimer
  3. Merci d'évoquer ces souvenirs d'enfance à la campagne où nous vivions librement de belles aventures toutes simples et en toute liberté, quand arrivaient les dimanches et les vacances(j'étais pensionnaire en ville )
    J'ai écouté le chant du grillon avec plaisir et nostalgie...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. La campagne est un terrain de jeux immense. Je n'idéalise pas (enfin, un peu peut-être), on s'y ennuie autant qu'en ville, j'imagine. Merci Ginou pour votre visite :-) Prenez soin de vous.

      Supprimer
  4. Ces évocations d'anecdotes de ton enfance me ramènent à la mienne...
    J'ai aussi une sœur prénommée Sophie et cette liberté insouciante d'aller où l'on voulait a marqué indélébilement ma vie.
    Il n'y avait pas eu encore les grandes frayeurs provoquées par les affaires Dutroux ou Fourniret.
    Nous étions invincibles et le mal n'existait pas, du moins nous le pensions.
    Merci Laurent pour ce partage et les 49 secondes qui disent tant !
    Des bisous confinés ;)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Nous étions jeunes et naïfs. Et libres. Nous le sommes toujours, libres. La naïveté s'est hélas fait la malle.
      Bisous masqués ;)

      Supprimer
  5. Hahaha le sale gosse repenti ! J'adore, on a tous - enfin j'espère - fait ce genre d'âneries. Merci pour la madeleine sonore et olfactive !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Repenti, pas tellement :p j’ai fait un paquet d'autres âneries mais rien de bien grave. C’est aussi ça l’enfance, explorer les interdits. Merci de ta visite :-)

      Supprimer
  6. je n'ai pas de souvenirs d'enfance très heureux, pourtant il y en a sans doute eu mais je crois que mon cerveau refuse aussi bien les bons que les mauvais, avec mon frère nous allions chercher aussi des têtards dans le drain de l'usine de retraitement des eaux, et on se prenait une volée en rentrant, faut dire qu'on aurait pu attraper la peste et le choléra réunis d'autant qu'on étaient sensés aller glaner les patates et les haricots dans les champs des alentours

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Tant que tu ne rapportais pas de légumes dans le drain de l’usine de retraitement des eaux... La mémoire est quand même un drôle de machin : elle nous permet d’oublier tout un tas de traumatismes. La mémoire, quand elle fonctionne et quand on la fait travailler. Moi, j’ai une mémoire de poisson rouge, c'est dramatique. Bisous ma poule.

      Supprimer
  7. Oh là là ! Que de souvenirs pour moi aussi les grillons !
    J’ai grandi avec. Mais je n’avais pas de cochon d’Inde. Donc pas de Tic Tac au chocolat 😂

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ni de voisin qui t'aurait fait goûter ces fameuses friandises ?

      Supprimer
  8. Enfance en ville et vacances en bord de mer... C'est du bruit de la mer que je suis nostalgique.
    Mais merci pour ce dépaysement ;)
    Bonne soirée

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Espérons que tu puisses bientôt retrouver la mer ;) Bonne soirée à toi aussi Marie :-*

      Supprimer
  9. Grâce à toi, comme souvent, je replonge dans les souvenirs de parfum des feuilles de tomates, du goût des groseilles et du passage du fermier qui remplissait le pot de lait lorsque je passais des vacances chez mes grands-parents à Ploemeur. Merci :-*

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. À ton service :) tes souvenirs ont eux aussi la douceur de l'enfance, avec l'air pur et vivifiant de l'Océan et de la Bretagne que je connais hélas trop peu. Bises du Sud :*

      Supprimer
  10. Les souvenirs d'enfance liés à la nature ont ce petit quelque chose... Jolies anecdotes !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci Carole. En ces temps agités et anxiogènes, on se raccroche aux branches :) Bises encore confinées.

      Supprimer
  11. Merci pour ce partage. Merci pour cette madeleine auditive. MERCI à toi et à Sophie. Prends soin de toi !
    Sophie (des Grigris)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. À ton service, Sophie :-) Merci pour tes gentils voeux, prends bien soin de toi et des tiens.

      Supprimer

Un commentaire, ce peut être un coucou, une amabilité, un point de vue divergent, un trait d'esprit, un signe de votre passage.

Pour celles et ceux qui n'osent pas (je ne mords pas) ou n'y parviennent pas, c'est tout simple :

1) Tapotez votre bonjour dans le formulaire de saisie ci-dessous
2) Sous Choisir une identité, cochez Nom/URL
3) Saisissez votre nom (ou pseudonyme ou si vous êtes timide le nom de votre cousine) après l'intitulé Nom
4) L'URL ne désigne pas l'Uto-Rhino-Laryngologie mais bien le lien d'un blog ou de n'importe quoi d'autre que vous jugerez bon d'accrocher à votre identité, la page Wikipedia de Sheila par exemple ; ou rien.
5) Cliquez sur Publier commentaire

Et le tour est joué. Elle est pas belle, la vie ?