Quand la vie est trop courte pour râler ou s'acheter des fleurs demain, j'invite le lecteur à s'émerveiller des petites choses. Dans les sillons creusés par l'inattendu ou le hasard, je sème les graines d'un regard humain, parfois mordant, et compose régulièrement un bouquet de rencontres ou d'échanges piquants, insolites, simples.

mercredi

Qu'est-ce que t'es laide !

Rentrant du boulot, je croise le chemin de la dame qui illustre le billet Sapée comme jamais. Dans ce papier léger et optimiste, j'évoquais en creux l'élégance comme rempart contre la morosité. La nécessité du beau. Et malgré l'épisode furtif que je vais vous narrer, je persiste à penser que le beau, le bon, le généreux réparent le monde. Mais le beau n'est pas nécessairement bon. 

Démonstration.

Cette dame probablement au crépuscule de ses soixante-dix ans descend la rue Montricher tandis que je la remonte. Elle allonge le bras et me presse l'épaule avec sa main. Que veut-elle ? J'ai beau l'avoir croisée quelques fois, je ne connais que son air apprêté, sa garde-robe bariolée et le toutou au bout de sa laisse. Un rictus de dégoût déforme son visage. Elle désigne du doigt la jolie jeune femme en robe à fleurs flottante en bas de la rue. 

– Non mais regardez. Ce cul énorme, ces cuisses, c'est horrible, non ? 

Je suis tellement estomaqué que je n'ai pour réponse qu'un pathétique :

– Elle fait comme elle peut.

Je ramasse encore mes bras de stupéfaction et m'en veux de lui avoir dit ça.

Si j'avais la possibilité de rembobiner la cassette de mon chemin et croiser l'ignoble trace de cette harpie, je lui répondrais :

– Vous êtes très élégante... mais pourrie de l'intérieur. 


13 commentaires:

  1. Énorme !!! 😱
    (Elo… mais Blogger sur iphone me rend anonyme)

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    1. C'est dingue. Déjà, comment quelqu'un que tu ne connais pas, avec qui tu n'as jamais échangé, peut se dire, tiens je vais interpeler ce gars et lui dire ce qui me passe par la tête, même si ce sont des horreurs...

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    2. Cette dame n'ose pas interpeller la passante qu'elle ne trouve pas à son goût. Elle l'agresse donc par personne interposée et tente de me contaminer avec sa vision nécrosée du monde. Ça me fait penser à Twitter 🤣

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  2. La laideur et la beauté ne sont pas des considérations externes. Elles qualifient mieux l'âme.
    Cette personne est donc l'aide... Ses propos disent aussi la solitude qui l'habite sans doute aussi.
    Laurent, continue à poser ton regard sur la vie. Tu la dit tellement bien !
    Bisous bruxellois.
    Ben

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    1. Seule et malheureuse, elle s'accroche aux branches de son mépris de l'Autre.

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    1. Sous son costume d'humaine, une blatte. Pauvres blattes 😬

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  5. Salut l'ami !
    Comme nous habitons un peu le même quartier, je pense l'avoir rencontrée.
    le 12 juin en revenant de voter dans ce fameux cube couleur soleil dont tu nous a parlé il y a peu.
    Tout en bas de la méchante pente, je vois surgir cette brave dame qui arborait un grand sourire (ou rictus ?) digne d'un passé d'enseignante de rigolade de Tatie Danielle et me lâche : " Ils font chier ces connards" à quoi je lui ai tout simplement répondu : "bonne journée, madame !"
    Quoi lui dire d'autre ?

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  6. Ce n'est que trop tard (comme toujours pour ceux qui réfléchissent) que vient la répartie... Peu importe. L'essentiel c'est de ne pas suivre les pauvres d'esprit sur leur chemin.. Mais de les laisser suivre le leur et continuer le notre. Et moi monsieur j'aime beaucoup votre chemin.

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    1. Merci beaucoup Margou ! Et bienvenue sur les plages de ce blog 🥰

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