Quand la vie est trop courte pour râler ou s'acheter des fleurs demain, j'invite le lecteur à s'émerveiller des petites choses. Dans les sillons creusés par l'inattendu ou le hasard, je sème les graines d'un regard humain, parfois mordant, et compose régulièrement un bouquet de rencontres ou d'échanges piquants, insolites, simples.

jeudi

Je n'ai pas glissé sur une peau de banane



Je m'apprêtais à écrire un billet bucolique. J'avais l'accroche : déjeuner sous le parfum des genêts. Fier comme Artaban de la rime surgie de façon inopinée alors que mon mari, le chien et moi humions l'air de la campagne et des genêts au pied du massif de la Sainte-Baume dans le Var. Mais à part une photo et un récit pas follement romanesque*, je n'avais pas de quoi tenir un billet ni un public en haleine. 

Puis est arrivé mon anniversaire 🎂

Réveillé par mon mec tenant un plateau pour un petit-déjeuner au lit avec viennoiseries à foison, je me suis dit que la journée ne pouvait pas mieux démarrer. Je vous fais un petit déroulé télégraphique du mercredi 22 mai 2024 :

Télétravail, messages et pensées d'amis, de proches, de ma sœur au chevet de ma mère, cadeau surprise de l'amie voisine sur le palier de la porte (le roman de Jean-Baptiste Andréa : Veiller sur elle ; hâte de le lire après avoir dévoré Un soir d'été de Philippe Besson puis Monique s'évade d'Édouard Louis), courses volumineuses pour lesquelles nous prenons la voiture, retour de courses, coucou du balcon de Simone qui nous aperçoit alors que nous franchissions le seuil du parking souterrain. Elle agite le bras pour nous signifier d'attendre, elle descend.

Nous nous garons à la va-comme-je-te-pousse, en travers de l'impasse, nous papotons. Avant de se quitter, un large sourire illumine son regard, elle lance :

— On ne se voit plus, mais je ne vous oublie pas hein ? Je vous aime, vous le savez ?

Bises chaleureuses à la volée. Retour au parking. Je pars chercher le caddie de la résidence (je salue ici l'initiative d'un voisin, d'une voisine, qui a subtilisé l'engin au supermarché d'à côté - c'est pratique, pratchique (en bon marseillais), pour véhiculer la montagne d'emplettes de la voiture au 7e étage via l'ascenseur). 

Ellipse.

J'ai atrocement mal (beaucoup moins, à l'heure où j'écris ce billet) et je m'amuse malgré tout, hier, à échanger avec mes pairs sur les réseaux. Je poste une photo : je suis allongé dans le canapé, deux pains de glace enveloppés dans un torchon rafraîchissent ma cheville qui a doublé de volume. J'écris : pour mon anniv, je me suis offert une entorse 🎁 je ne vous dis pas comment car c'est d'une manière très très très idiote.

Bon, je vous dis. Parce que malgré la douleur, c'est drôle. 

Sur Instagram, Threads, Bluesky, on me répond : Tu as porté des talons trop hauts ? On t'a offert un skate ? On m'écrit qu'on se fait une entorse rarement de façon intelligente, en glissant sur une feuille mouillée ou en loupant une marche ou un trottoir. Il n'y a qu'au cinéma ou chez Tex Avery qu'on fait des gadins acrobatiques en glissant sur une peau de banane. 

Pour ma part, j'ai saisi le caddie et, comme je l'ai fait tant de fois, quand j'étais gamin puis ado, j'ai posé mes deux pieds sur la barre transversale qui relie les deux roues arrières et j'ai dévalé la pente douce qui me mène à la voiture. Mais je n'ai plus sept ans, ni quatorze, ni vingt. Le chariot n'étant pas un kart ni un véhicule de course, au sens sportif du terme, pas de frein pour ralentir la vitesse, pas d'airbag pour amortir le choc. Sous le regard perplexe de mon mec qui m'attend au pied de la voiture, je tente vite fait un petit saut de gazelle pour me libérer du caddie et atterris sur le bitume du parking et... crac, ma cheville droite fait la danse de Saint-Guy. 

Je ne vous énumère pas les insultes dont je me suis couvert. La suite ressemble** au commencement de ma journée lorsque mon mari m'a déposé amoureusement un plateau sur le lit : il range les courses, sort le chien, cuisine, descend les poubelles, passe l'aspirateur sous mon regard reconnaissant, il m'apporte désormais le café sur demande. 


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* contrairement à la minute varappe racontée ici
** à une différence notable près, ma nouvelle compagne, la canne anglaise qui me soutient pour une petite semaine, peut-être.






17 commentaires:

  1. mais quel foufou ! rhôooo !!!! (excuse moi, j'ai ri :D )

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    1. Je t'excuse volontiers, j'ai écrit ce billet pour faire rire 😉

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  2. Voilà ce que c'est de vouloir faire le jeunot ! Ton mec doit regretter de ne pas avoir immortalisé le "saut de la gazelle"

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    1. Il a surtout eu peur que je me sois fait plus mal. Oui, je me suis dit : ça va pas la tête de faire des choses pas de ton âge ?!?

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  3. J'adore prendre des descentes en chariot de supermarché. Bon tapant largement plus de trois fois vingt ans et des annexes je vais me méfier désormais 😉 En cette période de jeux zolimpiques je me demande si cette discipline ne devrait pas y être inscrite. C'est quand même plus repandu que le surf 😆. bon rétablissement !..

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    1. Merci ! Oh il doit bien exister quelque discipline provoquant l'hilarité ! À vérifier 😉

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  4. Ma voisine Raymonde dirait oh fan de chichourle qui pour elle signifie Mais que j'ai été bête. Mais patience surtout ces petits os sont traîtres et repoussent lentement.
    Ps: j'ai appris d une amie de Toulouse que par chez eux on dit Fan de chichou. De l'occitan donc.

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    1. Je m'amuse à noter et réutiliser les expressions imagées du Sud. Merci pour ta lecture, ton commentaire, ta fidélité à mon blog, chère Anne O'Nyme 😘

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  5. J'ai failli cracher mon matcha latte en imaginant la scène. Au passage, j'ai décidé de me remettre aux rollers mais maintenant j'ai un doute... Bon rétablissement

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  6. Il vaut mieux se faire mal en s'amusant, à tout prendre. Remets toi bien.

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    1. Merci 😘 So true ! Se faire mal en glissant sur une feuille mouillée, ça fait mal au cul (au sens figuré comme au sens propre (ou pas, d'ailleurs, selon où l'on tombe)

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  7. Mais a-t-on idée de faire l'âne sur le chariot dit celui qui pas plus tard qu'il y a une heure faisait le bourricot juché sur le caddie dans les rayons du supermarché...
    Z'ont l'habitude, il ne me dit plus rien le gars qui surveille les rayons.
    Prends-toi bien soin camarade ! Bises.

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    1. Je vois que toi aussi tu as gardé ton âme d'enfant 😉 Attention malgré tout aux carambolages. Bises

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  8. Et voilà ...Laurent a un an de moins. il retombe en adolescence, du coup il s'est estramassé et il a un pied bouffigue.
    Le repos de guerrier 😊
    Hélène

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  9. Ça va mieux ?
    Hélène

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